Le vent souffle, caressant les cheveux de Zohra, la jeune protagoniste, assise pensivement au bord de la mer. Abruptement, le plan suivant montre des jeunes gens en discussion qui s’apprêtent à quitter les portes du lycée, la désinvolture de leurs gestes et de leurs mouvements. Quand Zohra obtient son baccalauréat et exprime le désir de poursuivre ses études à l’université, une altercation violente éclate avec son père. Convaincue de ses propres choix, elle n’a pas d’autre issue que de rompre et quitter la maison familiale. Le film retrace sa trajectoire en plusieurs épisodes. La caméra devient complice, enregistre les sourires partagés avec une amie chez qui elle trouve d’abord refuge et la bienveillance entre les deux jeunes femmes. Forcée à trouver un emploi pour subvenir à ses besoins, Zohra est exposée aux regards désapprobateurs de la société, aux harcèlements des hommes du quartier et de son patron. L’éveil prend la forme d’un songe, les yeux grands ouverts face à l’étendue d’une mer agitée, pour explorer l’intériorité d’une jeune femme à Tunis à la fin des années 1960, cheveux au vent, à contre-courant, en soulignant avec délicatesse sa détermination et les actes qui la mènent à la liberté.
Avec L’éveil, cette séance propose de mettre en évidence le rôle des clubs de cinéma en Tunisie, d’où émerge une nouvelle génération de cinéastes au seuil des années 1970. Au sein de l’Association des Jeunes Cinéastes Tunisiens, qui deviendra au milieu des années 1960 la Fédération Tunisienne des Cinéastes Amateurs (FTCA), un groupe de jeunes femmes du club d’Hammam-Lif, dont fait partie Selma Baccar, sont actives. Elles s’emparent de la caméra et réalisent leurs premiers films.