La vendeuse d’oranges – 01
2020 · 14min
La vendeuse d’oranges – 02
2020 · 13min
La série en cours Les vendeuses d’oranges fait allusion à un des sujets favoris des peintres orientalistes européens – des hommes pour la plupart – qui ont fabulé un « Orient » mythique, dans un contexte d’occupation militaire et d’expansion coloniale. Dans les deux vidéos, on peut entendre des voix qui semblent parfois décrire l’image qui se déroule devant nous, mais certaines descriptions nous échappent. Les scènes représentées dans les peintures ont été transposées dans un contexte intime, sur le seuil entre le privé et le public. La caméra révèle discrètement une chambre d’adolescente, une cage d’escalier, les détails urbains d’une banlieue française. La jeune femme qui apparaît à l’image se plaint de la pose artificielle qui lui est imposée, s’ennuie, écoute de la musique. Elle parle, interroge à la fois les peintures historiques qui donnent forme à cet exercice, mais aussi la mise en scène de l’artiste qui tente de filmer cette situation. Ses paroles sont encore accompagnées par les voix de deux narratrices hors-champ, Sarah Belhadi et Rim Battal, qui commentent et critiquent, elles aussi, les représentations picturales originales en soulignant leur impossible identification aux modèles et la fausseté des situations visualisées par les peintres sur un mode pseudo-documentaire.
La série Les vendeuses d’oranges brise le cadre de ces visions picturales révolues pour affronter les hantises de l’imaginaire colonial qui continue à alimenter les stéréotypes stigmatisant les jeunes femmes d’origine maghrébine en France et en Europe. En créant un moment collectif de questionnement en actes, l’artiste ouvre un espace de sujectivation d’où peuvent émerger de nouveaux récits et de nouvelles images, dont l’enjeu est aussi bien esthétique que politique.